Loetitia Raymond
Port-au-Prince
19 janvier 2010 Hans 34730652
Depuis une semaine des centaines de camps de fortunes ont tristement fleuri le parterre des trottoirs de Port-au-Prince et de ses environs. Sans logement et sans aucune source de revenu pour la plupart, les sinistrés ont besoin de l’aide internationale pour survivre. Depuis mon arrivée dans les bureaux de CARE Haïti, transformé en camp de fortune pour certains des employés qui ont perdu leur maison, je découvre une équipe admirablement engagée et mobilisée, alors que bon nombre d’entre eux ont perdu leur habitation, parfois des membres de leur famille. De 7h du matin à 22h pour certains, 7j sur 7, chacun tente de faire face à l’envergure des besoins pour mettre en place l’aide à la population.
D’un côté j’assiste à une formidable mobilisation et au courage de tout un peuple, à l’engagement des ONGs qui n’ont qu’un objectif : sauver des vies, venir en aide au plus vite à ceux qui ont tout perdu. De l’autre, j’entends gronder les doutes, les remises en question de ceux qui sont loin, de ceux qui n’imaginent pas, puisque personne ne peux imaginer.
J’entends les interrogations autour d’une éventuelle lenteur de l’acheminement de l’aide. Il est vrai que l’exceptionnel élan de générosité des citoyens à travers le monde pourrait laisser croire que nous serions à même de montrer rapidement les images tant attendues : des tonnes de nourriture, de vêtements, des biens de première nécessité distribués en masse. Mais le chaos dans lequel règne le pays et la ville transforment chaque opération, chaque action en une équation à mille inconnues. Comment acheminer l’aide en temps de pénurie d’essence ? Comment assurer la sécurité des distributions alors que les haïtiens n’ont pas eu de quoi se nourrir depuis des jours ? Les distributions se font sous haute surveillance car il est illusoire de croire que l’on peut arriver dans un camp de 6000 personnes, sans nourriture depuis une semaine, sans encadrer un tant soit peu l’opération ! Comment trouver des salariés, des chauffeurs, des gardiens, mais aussi des logisticiens, des assistants administratifs, des secrétaires en un temps record ? Comment louer des camions, trouver les biens de première nécessité à distribuer tandis qu’il ya pénurie de tout et que nous avons besoin de tout ? Trouver ne serait-ce que des stylos ou du papier pour les bureaux peut prendre des heures. Il en va de même pour se procurer des téléphones, outils de communication indispensables à notre travail. Sans compter que les réseaux sont saturés. Or nous sommes des centaines, des milliers d’organisations faisant face aux mêmes besoins !! Comment déblayer les rues alors qu’il manque d’outils ? Comment suivre la trace des déplacés internes qui fuient la capitale et leur apporter l’aide nécessaire ?
Est-ce que nous avons des difficultés de coordination ? Bien sûr !!! Et ce n’est pas faute de tout mettre en œuvre pour ne pas dupliquer nos efforts, ne pas oublier des communautés. Les ONGs et autres instances internationales, les représentants des institutions se réunissent quotidiennement pour coordonner la réponse à l’urgence. Mais imaginez la difficulté à prendre des décisions dans un pays dont les institutions ont été en partie décimées…
Nous faisons certes face à un défi logistique mais nous y sommes toutefois préparés ! CARE établit chaque année un plan de préparation aux urgences dans lequel nous définissons des scénarii possibles selon les risques auxquels sont exposés le pays. Nous savons quelles sont les actions à mettre en place dans les premières 24h, après 48h et ainsi de suite.
Alors si l’aide semble arriver moins vite que l’on pourrait le souhaiter, c’est parce que les ONGs sont confrontées à des contraintes extrêmement complexes, et que l’on sait d’expérience qu’une réponse bien menée ne peut se faire sans respecter un certain nombre d’étapes. Dans les bureaux de CARE, tous s’affèrent avec volonté et professionnalisme. Point par point les équipes font en sorte d’apporter des solutions, lister des priorités. Depuis 4 jours je vois peu à peu la générosité de tous nos donateurs à travers le monde prendre corps en actions concrètes. Je vois CARE distribuer de l’eau, de la nourriture, des matelas, des kits d’hygiène, des pelles…Et ça ne fait que commencer. Puisque nous serons à leurs côtés pour des années.
S'abonner à :
Publier des commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Publier un commentaire